Du monde au désert: l’aspiration à la solitude au XVIIe siècle (éd. Nathalie Nabert)

EAN/ISBN : 9782701023014
Nb de pages : 248
Année : 2021
22.00 €

Dans la première moitié du XVIIe siècle, un véritable engouement apparaît pour la vie contemplative et solitaire, en dehors des ordres constitués. Cet engouement touche des femmes du siècle, d’anciens militaires, des laïcs, avocats, chevaliers, seigneurs de province, clercs qui tout en souhaitant mener une vie intérieure plus dense et plus contemplative, ne s’engagent pas dans les ordres monastiques. Ils se retirent du monde, totalement ou partiellement, dans des lieux isolés, parfois éloignés des villes et s’engagent au silence, à la prière et à la conversion de leurs mœurs. Ils rejoignent les solitaires de Port-Royal, comme Pierre-Thomas du Fossé, ou fondent, pour certains, des résidences, comme ce fut le cas de Jean de Bernières Louvigny, Trésorier du roi de France, membre laïc du Tiers-Ordre franciscain et qui fonda, à la fin de sa vie, l’ermitage de Caen.
Cet univers de l’entre-deux, du monde au désert, se constitue de façon pérenne dans un contexte encore marqué par le souvenir de la Ligue et bientôt confronté à la Fronde. Il s’élabore dans une période où le sentiment religieux s’individualise et s’approprie la mystique Rhéno-flamande et la Devotio moderna dont la chartreuse de Paris – qui fut une des grandes inspiratrices du désir de retrait du monde – favorisera la diffusion en français. Ces nouveaux convertis s’attachent donc à la contemplation mais aussi à la doctrine de la pauvreté volontaire, dans la mouvance franciscaine, comme Gaston de Renty qui se retirera de la vie militaire, en Normandie, pour se consacrer aux pauvres. Tous sont attirés par la doctrine de l’abandon véhiculée par les écrits de Benoît de Canfield, de Surin et plus tard de Madame Guyon, ce qui vaudra à certains d’entre eux la méfiance de l’autorité ecclésiale, voire la condamnation pour quiétisme. Il s’agit avant tout de fortes personnalités qui iront jusqu’au bout de leur projet, parfois en marge des institutions, comme Jean de Labadie. L’aspiration à la solitude, à travers ses modèles institutionnels, leur dépassement et sa réinvention permanente pose ainsi la question de la liberté de l’homme face aux enjeux de sa foi et de son engagement sociétal dans un XVII e siècle commençant, marqué, comme le soulignait Henri Bremond, par l’invasion mystique. Et au-delà des cas de figure étudiés au cours de la première journée, c’est toute une tradition esthétique du retrait du monde qui se laisse percevoir et qui perdurera dans les milieux laïcs où progressivement retraite et contemplation de la nature se rejoignent laissant un patrimoine architectural et pictural riche qui évoqué dans la troisième partie de ce livre.

Conseil scientifique : Nathalie Nabert, Institut Catholique de Paris, CRESC, Pascal Pradié (osb), CRESC, attaché de recherches au CNRS, CRAHAM, Jean-Robert Armogathe, École Pratique des Hautes Études, président de la Société d’étude du XVII e , Gérard Ferreyrolles Paris IV-Sorbonne, Philippe Luez, Conservateur général du patrimoine, Directeur du musée national de Port-Royal des Champs.

SOMMAIRE

Introduction : solitude et solitaires, une effervescence mystique par Nathalie Nabert

I. DE L’INSTITUTION ET DES HOMMES
Jean- Marie Constant (Professeur émérite de l’Université du Mans, Président honoraire de la Société d’étude du XVII e siècle et des historiens modernistes)
L’INFLUENCE DE LA LIGUE SUR LE RENOUVEAU MYSTIQUE DU XVII E SIÈCLE

Nathalie Nabert (Institut Catholique de Paris, CRESC)
LE MODÈLE CARTUSIEN  ET LE RAYONNEMENT DE LA CHARTREUSE DE PARIS COMME SOURCE D’INSPIRATION AU RETRAIT DU MONDE.

Pierre Moracchini (Ecole franciscaine de Paris)
LES FRANCISCAINS FRANÇAIS ET « LA SOLITUDE SÉRAPHIQUE »AU XVII E SIÈCLE.

Murielle et Dominique Tronc (Editeur critique des œuvres de Madame Guyon)
CONTEMPLATION ET « VIE COMMUNE » CHEZ MONSIEUR BERTOT ET MADAME GUYON.

II. DES HOMMES ET DIEU

Jean Lesaulnier (CNRS)
LE DÉSIR DE RETRAITE AU DÉBUT DU XVII E SIÈCLE : LA FIGURE D’ANTOINE LE MAISTRE.

Jean-Robert Armogathe (Ecole pratique des Hautes Etudes, président de la Société d’étude du XVII e )
LE PREMIER SOLITAIRE, ANTOINE LE MAISTRE, RÉFLEXION SUR LE MOT SOLITAIRE.

Christian Belin (Université Paul Valéry, Montpellier)
LES FIGURES DE L’ANACHORÈSE DANS LE PARADIS DE LA SOLITUDE (1624) DE MICHEL DE SAINTE SABINE.

Jean-Robert Armogathe (École pratique des Hautes Études, président de la Société d’étude du XVII e )
JEAN DE LABADIE, AUTEUR DE LA SOLITUDE CHRÉTIENNE (1645), UN ERRANT.

Jean- Marie Gourvil  (Ancien directeur des études à l’IRTS-Normandie/Caen)
JEAN DE BERNIÈRES ET L’ERMITAGE DE CAEN, INTÉRIORITÉ MYSTIQUE ET ACTION DANS LA CITÉ.

Bernard Pitaud, (p.s.s, ancien directeur de l’Institut de formation des éducateurs du clergé)
GASTON DE RENTY ET LA SOLITUDE.

Pascale Thouvenin  (Université de Brest)
L’EXPÉRIENCE DE LA SOLITUDE SELON LES SOLITAIRES DE PORT-ROYAL : « UNE HEUREUSE SOLITUDE, D’AUTANT PLUS FRÉQUENTÉE PAR LES ANGES QU’ELLE L’EST PEU DES HOMMES ».

III. ESTHETIQUE ET IMAGINAIRE DE LA SOLITUDE

Pascal Pradié  osb. (CRESC, attaché de recherches au CNRS, CRAHAM)
L’ICONOGRAPHIE DES PÈRES DU DÉSERT, POINT DE CONTACT ENTRE LES MILIEUX CARTUSIENS ET SÉCULIERS.

Vincent Simonet (Conservateur en chef des Monuments historiques, DRAC de Normandie, site de Rouen)
L’APOLOGIE DE LA SOLITUDE DANS LES QUATRE PAYSAGES AVEC DES SAINTES AU DÉSERT, PEINTS PAR PHILIPPE DE CHAMPAIGNE (1602-1674) POUR L’ABBAYE BÉNÉDICTINE DU VAL-DE-GRÂCE DE PARIS.

Philippe Luez (Conservateur général du patrimoine, Directeur du musée national de Port-Royal des Champs)
PORT-ROYAL DES CHAMPS OU LA THÉBAÏDE

Laurence Plazenet (Professeur à l’Université Clermont Auvergne, Présidente de la Société des Amis de Port-Royal et Directrice-adjointe du Centre international Blaise Pascal)
CONCLUSIONS : LA SOLITUDE, UN SOLEIL NOIR.

IV. BIBLIOGRAPHIE DES AUTEURS